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Projet de loi de finances pour 2019

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, disons d'emblée les choses clairement : l'adoption plus que probable de la motion tendant à opposer la question préalable sur ce projet de loi de finances, qui entraînera le rejet du texte, est davantage dictée par des impératifs d'agenda, l'Assemblée nationale ayant elle-même achevé ses travaux vers six heures ce matin, que par des considérations strictement politiques. Mon groupe le regrette profondément, car, encore une fois, le Sénat ne pourra pas exercer jusqu'au bout ses prérogatives de législateur, a fortiori dans le contexte social que nous connaissons.

Il faudra tout de même un jour sérieusement s'interroger sur les conditions parfois ubuesques dans lesquelles le Parlement débat et vote la loi. Sauf à tout faire pour multiplier les malfaçons législatives, il n'est pas raisonnable que nous légiférions sur des sujets graves et sérieux à des heures aussi tardives. Chaque année, mon groupe ne peut que se désoler de ces conditions d'examen du projet de budget, qui nous obligent à survoler des sujets complexes tant par leur multiplicité que par leur technicité.

Quoi qu'il en soit, après plus de 2 000 amendements déposés en première lecture et à nouveau 1 200 hier à l'Assemblée nationale, le Sénat devrait faire preuve d'une grande diligence, au milieu d'un ordre du jour sans cesse modifié.

Nous ne pouvons non plus abstraire notre discussion d'aujourd'hui de l'examen, vendredi, du projet de loi portant mesures d'urgence économiques et sociales. Je veux le redire : la crise que traverse notre pays n'est pas qu'une simple saute d'humeur, elle est l'expression d'un mal plus profond, enkysté depuis plusieurs décennies, qui s'est développé au gré de gouvernements successifs.

Le refus massif de la hausse des prix des carburants n'a été qu'un symbole et qu'un symptôme. Ce que beaucoup de nos concitoyens interrogent aujourd'hui, c'est bien notre pacte social.

Bien sûr, l'ordre républicain a été rétabli après les dérapages et violences inacceptables qui ont connu leur paroxysme le 8 décembre dernier. Nous nous en réjouissons – je l'ai exprimé à plusieurs reprises –, même s'il ne s'agit que d'un préalable.

L'intervention du Président de la République a apporté des réponses concrètes à l'urgence politique et sociale, même si les annonces doivent encore se transformer en actes. Je sais, monsieur le secrétaire d'État, que le Gouvernement veillera fermement à ce que les décisions du Président de la République soient traduites dans la loi ! Oui, la loi est l'expression de la volonté générale et la haute administration n'en a certainement pas le monopole : la technocratie après le politique, et pas avant !

Finalement, ce projet de loi de finances a de fortes chances d'être modifié son encre à peine sèche. Le grand débat annoncé par le chef de l'État pour le début de l'année 2019 apportera son lot de propositions et d'innovations, sous l'égide de la Commission nationale du débat public. Je souhaite que les élus y prennent toute leur part, dans la mesure où ils sont les meilleurs connaisseurs des réalités du terrain, nous le savons bien ici, au Sénat.

De façon plus pragmatique, le texte qui nous intéresse aujourd'hui n'a évidemment plus rien à voir avec celui qu'a imaginé à la fin du mois de septembre dernier le Gouvernement.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C'est clair !

M. Jean-Claude Requier. Le déficit public a été revu à la hausse de 0,1 point pour 2018 et, surtout, de 0,4 point pour 2019, repassant au-dessus de la barre des 3 % du PIB. C'est une inflexion importante, mais nécessaire, pour répondre à l'urgence économique et sociale, même si le rétablissement des finances publiques doit rester un outil du développement de notre pays.

Comme je l'ai déjà dit, nous ne pouvons pas non plus ignorer le contexte européen. Aux incertitudes politiques que nous connaissions – coalition populiste en Italie, Brexit au Royaume-Uni – s'en ajoutent d'autres, comme la chute du Gouvernement belge hier sur la question migratoire. L'Europe et, plus largement, nos démocraties occidentales sont atteintes de convulsions inquiétantes.

Notre modèle politique et social est lui-même remis en cause. Notre débat budgétaire en subit les conséquences, quand bien même il ne s'agit que d'une question secondaire au vu des tensions que nous traversons.

Plus modestement, le Sénat a également connu son lot de tensions, avec les sautes d'humeur des uns ou des autres. Toutefois, gardons le sens de la mesure. Dans le contexte actuel, cet épisode doit surtout nous appeler collectivement, Gouvernement et majorité sénatoriale, à la responsabilité. Nous incarnons la démocratie représentative et sommes, à ce titre, tenus d'agir pour l'intérêt général, corollaire de la confiance placée en nous par nos concitoyens. Certes, cette confiance varie dans le temps, allant même jusqu'au rejet des institutions. Néanmoins, rien ne serait pire que de diluer les corps intermédiaires, au premier rang desquels les élus et les maires, piliers de la République.

Très attaché au rôle du Parlement, mon groupe regrette – sans naïveté, rassurez-vous ! (Sourires.) – que l'Assemblée nationale et le Sénat n'aient pu parvenir à un accord en commission mixte paritaire. Je me félicite toutefois de la reprise de certains de nos amendements par les députés, parmi lesquels le maintien de la taxe sur les friches commerciales et le rétablissement du régime fiscal des sociétés d'intérêt collectif. Enfin, nous nous félicitons qu'aboutisse notre combat historique pour le plafonnement de l'exonération d'impôt sur les hauts revenus de journalistes, rédacteurs et critiques ! (M. Roger Karoutchi rit.) Nous avions encore une fois raison trop tôt et je me réjouis que les députés aient rejoint les sénateurs pour supprimer cet avantage injustifié.

En revanche, je regrette naturellement que certains autres de nos amendements n'aient in fine pas été retenus par l'Assemblée nationale. Je pense en particulier à la méthanisation des déchets, aux redevances de concessions hydroélectriques ou encore au refinancement du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce, le FISAC.

En conclusion, même si l'issue du vote sur la motion tendant à opposer la question préalable fait peu de doutes, nous avons déposé quatre amendements, conformément à la tradition de notre groupe, ouvert à la discussion et au dialogue. Nous comprenons que cette motion ait été déposée ; pour autant, nous ne la voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)


Visualisez la vidéo sur le site du Sénat :

http://videos.senat.fr/senat/2018/12/encoder1_20181219142332_1_3540409_3946960.mp4
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