By admin on mardi 4 décembre 2018
Category: TRAVAIL PARLEMENTAIRE

Projet de loi de finances pour 2019 : Culture

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce budget s'inscrit dans la continuité des orientations de la politique du ministère, dont l'effort en faveur de l'éducation artistique et culturelle, ainsi que de la restauration du patrimoine, mérite d'être souligné.

La moitié des crédits du programme « Patrimoines » sont destinés aux grandes institutions muséales et patrimoniales, ainsi qu'à l'Institut national de recherches archéologiques préventives. Deux grands chantiers de restauration, l'aménagement du Grand Palais et celui du château de Villers-Cotterêts, expliquent une hausse de plus de 100 millions d'euros des autorisations d'engagement. Nous veillerons à ce que calendriers et financements soient respectés.

Le loto du patrimoine a été pérennisé pour trois années, mais je m'interroge sur ses conditions de mise en œuvre. S'il a connu un réel succès de participation, avec 7 millions de tickets vendus, il existe un risque de rupture de confiance. En effet, les contributeurs ont été surpris de découvrir que, sur les quinze euros dépensés par ticket, 1,52 euro seulement bénéficierait réellement au patrimoine.

De fait, comme nos rapporteurs l'ont fait observer, sur les 200 millions d'euros de fonds collectés, seuls 21 millions d'euros reviendront à la Fondation nationale du patrimoine, compte tenu des contraintes légales et financières de l'opération.

Dès lors, monsieur le ministre, je m'interroge : ne serait-il pas plus efficace pour atteindre le but visé – financer la sauvegarde de notre patrimoine – d'encourager nos concitoyens à consentir des dons directement à des associations de gestion du patrimoine ?

J'en viens au programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Il est doté de 1,2 milliard d'euros, un budget en hausse de 2 millions d'euros par rapport à cette année. L'action en faveur de la démocratisation et de l'éducation artistique et culturelle voit, elle, ses crédits progresser de 17 %, ce qui est très positif.

De cette action, le pass culture est une mesure emblématique. Cinq millions d'euros ont été consacrés cette année à la phase d'étude de son pilotage informatique. Le volet expérimentation mobilise désormais 34 millions d'euros, sans toutefois que l'on sache comment ces crédits seront ventilés.

En régime plein, le pass culture pourrait concerner jusqu'à 820 000 jeunes, pour un coût annuel de 400 millions d'euros. La question de son financement et des conditions de sa mise en œuvre à l'horizon de 2022 reste non tranchée à ce jour. Mon groupe veillera à ce que, sans dérive des coûts, le pass culture facilite l'accès réel de tous les jeunes à la culture, dans sa grande diversité.

En matière d'éducation artistique et culturelle, nous serons très attentifs à ce que la cible de 100 % soit atteinte en 2020. La part des enfants scolarisés ayant bénéficié d'une action subventionnée par le ministère a quasiment doublé entre 2016 et 2018, passant de 45 % à près de 80 %, ce qui est déjà très encourageant.

En ce qui concerne le programme « Créations », qui m'intéresse particulièrement en ma qualité de présidente du groupe d'études sur les arts de la scène, de la rue et des festivals en région, il sera doté de 782 millions d'euros. Malgré la stabilité du budget de ce programme, les signaux envoyés à la filière ne paraissent pas vraiment opportuns. Ainsi, aucun crédit n'est alloué au Centre national de la musique, pourtant annoncé depuis dix ans ; je voterai l'amendement que la rapporteur pour avis de la commission de la culture a déposé pour y remédier.

Par ailleurs, afin de continuer à favoriser la diversité culturelle, il est nécessaire de rétablir le crédit d'impôt sur le spectacle vivant dans sa version initiale.

Mme Maryvonne Blondin. Tout à fait !

Mme Françoise Laborde. S'agissant de l'emploi dans la création, la baisse des contrats aidés et des crédits du Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle fragilise le secteur artistique.

Le Gouvernement compte beaucoup sur le mécénat pour contribuer au financement de la culture. Or la Cour des comptes, dans un rapport récent, épingle les services de l'État pour leur « gestion trop passive de cette dépense fiscale », se demandant même si « l'intérêt général reste la caractéristique majeure de l'engagement des mécènes », par rapport à des intérêts plus particuliers. En effet, 44 % des crédits bénéficient à seulement vingt-quatre très grosses entreprises. (Mme Sonia de la Provôté approuve.)

Ces critiques, sérieuses, doivent conduire à encadrer davantage le dispositif et à contrôler les entreprises mécènes. Cette évaluation doit être menée l'année prochaine ; elle fera l'objet de toute notre attention.

Monsieur le ministre, les surcoûts élevés liés à la nécessaire sécurisation des spectacles vivants et la prochaine disparition du Fonds d'urgence sont source d'inquiétudes. Je vous rappelle l'engagement pris de verser 300 000 euros aux cirques traditionnels pour compenser la chute de fréquentation et de chiffre d'affaires qui les a frappés après les attentats : j'espère qu'il sera tenu avant la fin de l'exercice 2018.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu de la pérennisation du budget de la culture dans le projet de loi de finances pour 2019, l'ensemble des membres du groupe du RDSE votera les crédits de cette mission ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – Mme Claudine Kauffmann applaudit également.)