By Sandra on mercredi 7 décembre 2022
Category: TRAVAIL PARLEMENTAIRE

Projet de loi de finances pour 2023

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après l'examen de la première partie du budget, sensiblement allongé par la réforme de la loi organique relative aux lois de finances, mais aussi par la croissance continue, d'année en année, du nombre d'amendements, nous avons achevé hier soir, ou plutôt ce matin, puisqu'il était une heure trente, l'examen de la seconde partie de ce projet de loi de finances.

Comme je l'ai indiqué lors de la discussion générale, le 17 novembre dernier, le Sénat a délibéré.

Si cette délibération a parfois été contrainte par les nouvelles règles d'examen des missions selon un temps programmé, ces règles, sur l'invitation du président de la commission des finances, ont dans l'ensemble été bien respectées par notre assemblée.

Que subsistera-t-il des nombreuses modifications adoptées lors de cette première lecture, alors que la réunion de la commission mixte paritaire a été avancée à ce soir et que selon toute probabilité, le 49.3 sera de nouveau utilisé à l'Assemblée nationale ?

Nous suivrons cela de près tant la situation actuelle est inédite.

Le Sénat et l'Assemblée nationale ont su trouver un terrain d'entente dans le cadre des deux lois de finances rectificatives adoptées cette année, évitant ainsi de nouvelles lectures. Ne pourrait-il en être ainsi pour le projet de loi de finances pour 2023 ? J'en appelle à la modération de chacun, afin de préserver la crédibilité, à terme, de nos institutions.

Les amendements proposés par le Gouvernement et adoptés par le Sénat ont de fortes chances de perdurer : suppression de la condition d'âge de décès d'un époux ancien combattant pour la demi-part de sa veuve, modalités d'indexation de la déduction pour épargne de précaution, ajustements de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des énergéticiens, ainsi qu'un certain nombre d'ouvertures de crédits dans le domaine de la sécurité civile, lutte contre les incendies, justice judiciaire, alimentation des étudiants, enseignement agricole, revalorisation des salaires de l'action sanitaire et sociale et, surtout, abondement des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » à hauteur de 6 milliards d'euros afin d'élargir le bouclier tarifaire à l'habitat collectif et de réévaluer les charges du service public de l'énergie.

Le rejet par la majorité sénatoriale de quatre missions, en particulier les missions « Cohésion des territoires » et « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », n'est pas très surprenant — cela arrive tous les ans —, mais il nous conduit à voter un budget amputé de nombreux crédits, même si la question des missions de l'État dans certains domaines peut légitimement se poser. C'est d'autant plus vrai au vu du déficit massif que nous nous apprêtons encore à valider en 2023.

Ce déficit pourrait en outre être aggravé par des imprévus liés à la situation internationale. Les prévisions de croissance du Gouvernement restent crédibles, bien que, dans ce domaine, celles-ci s'apparentent souvent à des prévisions météorologiques.

La réforme phare de la première partie du projet de loi de finances était la suppression, en deux ans, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la fameuse CVAE. La majorité sénatoriale a tenté une solution médiane, préservant à la fois la compétitivité des entreprises et les finances des collectivités, avec un coût budgétaire non négligeable pour l'État, mais la CVAE a survécu, du moins au Sénat.

Ces dernières années, les réformes de la fiscalité ont été marquées par un recours de plus en plus fréquent et diversifié aux recettes de TVA : d'abord, pour le financement des régions, bientôt, pour celui des départements, aujourd'hui, de façon massive, en faveur de la sécurité sociale. En période d'inflation des prix à la consommation, cette évolution n'est pas défavorable aux finances publiques, même si le consommateur en paie concrètement la facture.

Le rapport de la Cour des comptes de cet automne sur la situation des finances locales était éclairant au regard des comparaisons internationales. Les finances des collectivités territoriales ne représentent en France qu'environ 20 % de la dépense publique, loin derrière les dépenses de la sécurité sociale et celles de l'État. C'est bien inférieur à la moyenne européenne, où les dépenses des collectivités locales représentent en moyenne 40 % de la dépense publique. Il est vrai que le niveau global de la dépense publique en France reste l'un des plus élevés de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

En 2023, toutes les missions de l'État ou presque verront leur budget augmenter. C'est l'effet, d'une part, de l'inflation, d'autre part, de la volonté du Gouvernement d'assurer un certain nombre de missions essentielles. C'est aussi la conséquence du grand retour du « service » de la dette lié à la remontée des taux d'emprunt, auquel l'on consacrera plus de 50 milliards d'euros l'an prochain...

Mon groupe se félicite de l'adoption de certaines de ses propositions : l'exonération de la taxe malus sur les véhicules pour les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), l'indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l'inflation, la suppression du critère de potentiel financier pour la dotation particulière « élu local » (DPEL) et, dans la seconde partie du projet de loi de finances, le financement des charges de débroussaillement pour les communes à fort linéaire, la majoration de la dotation biodiversité à hauteur de 4 millions d'euros, ou encore la réintégration du critère de voirie pour le calcul de la dotation de solidarité rurale (DSR).

Nous regrettons malgré tout que de nombreuses autres propositions n'aient pas rencontré le même succès, en particulier dans les secteurs du développement local et durable, et du médico-social, ou dans le secteur patrimonial et culturel.

Sur la taxe d'aménagement, la suppression de la réforme de la répartition au sein du bloc communal, votée l'an dernier, nous paraît préférable, dans la mesure où la répartition des charges d'aménagement varie beaucoup en fonction de chaque territoire.

La répartition du produit de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l'Ifer, reste un sujet complexe qui mériterait davantage de débat. Il faut en tout cas veiller à ce que celle-ci reste incitative pour les acteurs locaux afin de favoriser l'acceptation et l'implantation de parcs éoliens ou solaires.

Une nouveauté de ce projet de loi de finances pour 2023 est la possibilité d'amender les indicateurs de performance et plus largement les plafonds d'emplois de l'État et de ses opérateurs. Nous verrons s'il s'agit bien d'un levier d'amélioration de l'action publique ou d'un gadget de plus.

En conclusion, après ces différentes remarques et au vu des nombreux points évoqués, les élus du groupe du RDSE voteront majoritairement pour l'adoption de ce projet de loi de finances pour 2023, à l'exception néanmoins de quelques abstentions, diversité et liberté de vote obligent. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)