By Sandra on mercredi 4 mars 2020
Category: TRAVAIL PARLEMENTAIRE

Proposition de loi relative à la transparence de l'information sur les produits agricoles et alimentaires

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC.)

M. Joël Labbé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi examinée aujourd'hui comporte plusieurs mesures intéressantes et utiles. Ces dernières avaient été adoptées, pour leur majeure partie, au sein de la loi Égalim, mais avaient été censurées par le Conseil constitutionnel au motif qu'elles constituaient des cavaliers législatifs.

Je veux notamment souligner l'intérêt des avancées relatives à l'étiquetage des mélanges de miels : l'obligation de mentionner l'ensemble des pays d'origine, classés par ordre décroissant, est une réelle avancée, à la fois pour les apiculteurs et pour les consommateurs. Il est néanmoins important que la France poursuive ce travail à l'échelon européen, afin d'aller plus loin encore : il faudrait pouvoir afficher la proportion que représente chaque origine. Le ministère s'est engagé à travailler pour plus de transparence ; il semble que d'autres pays, comme l'Espagne, le Portugal et la Grèce, partagent la même ambition.

J'espère que nous pourrons voir aboutir prochainement l'étiquetage le plus précis possible pour ce produit, qui fait l'objet de fraudes bien trop nombreuses.

Les avancées que l'on peut relever quant à la transparence des pays d'origine du cacao, de la gelée royale, des viandes, du vin et de la bière vont également dans le bon sens.

On peut néanmoins s'interroger sur la géométrie variable avec laquelle les décisions sont prises quant à l'étiquetage de l'origine : on sent un véritable volontarisme politique pour certains produits – c'est une très bonne chose –, mais d'autres produits, tout aussi importants pour nos territoires, méritent également un engagement fort.

J'avais d'ailleurs déposé plusieurs amendements sur ce sujet lors de l'examen du texte en commission. Je ne les ai pas déposés de nouveau pour la discussion en séance, dans le souci d'obtenir l'adoption conforme de ces articles.

M. Didier Guillaume, ministre. Merci !

M. Joël Labbé. Je tiens néanmoins à les évoquer à présent devant vous. L'un de ces amendements avait pour objet l'affichage de l'origine des huiles essentielles. Alors que notre pays est doté d'une tradition de production de plantes médicinales et d'un patrimoine à faire valoir en la matière, nous importons 80 % des plantes que nous consommons, comme l'a montré la mission d'information sur le développement de l'herboristerie et des plantes médicinales. J'ai bien noté l'intérêt de nombre d'entre nous et de M. le ministre pour cet amendement et je serai attentif aux suites à lui donner ; nous sommes prêts à travailler ensemble sur ce sujet.

Au-delà de la transparence quant à l'origine des produits alimentaires, les consommateurs souhaitent connaître le mode de production des aliments qu'ils achètent. C'est aussi dans l'intérêt des producteurs de notre pays !

Le plan gouvernemental pour le bien-être animal fait référence à un travail à mener à l'échelon européen sur l'étiquetage du mode d'élevage. J'espère qu'un réel volontarisme permettra de tenir cet engagement. L'étiquetage de l'alimentation animale par des organismes génétiquement modifiés me semble être un souhait évident des consommateurs ; ce serait également un levier pour aider les éleveurs qui font le choix d'une alimentation locale à valoriser leur travail.

Aussi, même si j'ai bien compris la volonté de parvenir à une adoption conforme de ce texte, je souhaite que nous ayons d'autres occasions de travailler sur ce sujet, afin de faire encore progresser la transparence. Les attentes des citoyens sont – je le répète – très fortes à cet égard, et il y va – je le répète aussi – de l'intérêt de nos producteurs.

Le texte contient également des avancées intéressantes sur les semences.

M. Didier Guillaume, ministre. Merci !

M. Joël Labbé. Je ne partage pas votre point de vue à ce sujet, madame la présidente de la commission, mais cela ne vous surprendra pas ! La facilitation de l'usage des semences paysannes par les particuliers constitue bien une avancée. Ce sont, par définition, des semences résistantes ! On parle ces temps-ci du virus de la tomate : on sait d'où viennent ces problèmes viraux qui vont se généraliser si l'on ne change rien. C'est aussi pour cette raison qu'il faut défendre les variétés locales et les semences paysannes.

Malgré ces points positifs, j'ai deux regrets importants concernant cette proposition de loi.

Le premier porte sur une mesure, qui avait été adoptée au sein du projet de loi Égalim et censurée comme cavalier, mais qui n'a, pour sa part, pas été reprise dans le présent texte : il s'agit de l'étiquetage des huîtres.

Le Comité national de la conchyliculture (CNC), dont j'ai rencontré les représentants, travaille sur un rapport visant à progresser dans ce domaine. À mon sens, les ostréiculteurs traditionnels, qui sont les premiers demandeurs d'un tel étiquetage, ne sont pas suffisamment écoutés.

Malgré tout, j'ai bon espoir que le CNC décidera de la mise en place de cet étiquetage par les professionnels, sans qu'une action législative soit nécessaire.

Une deuxième disposition du texte me paraît éminemment problématique, à savoir l'affaiblissement du label « fromage fermier ».

Comme je l'ai répété à l'occasion de chaque débat que nous avons eu sur le sujet, la mesure proposée constitue à mes yeux une réponse aux industriels qui cherchent à récupérer cette mention valorisante.

M. Didier Guillaume, ministre. C'est l'inverse !

M. Joël Labbé. Pourtant, ce label permet aujourd'hui aux éleveurs affinant leur fromage sur leur exploitation de faire valoir leur savoir-faire.

Mme la présidente. Il vous faut conclure, mon cher collègue !

M. Joël Labbé. Malgré ces réserves, mon collègue Ronan Dantec et moi-même, ainsi que les autres membres du groupe du RDSE, voterons en faveur de ce texte, en reconnaissance des avancées qu'il contient. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, LaREM, SOCR.)