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Proposition de loi relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée »

Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, en juillet dernier, le Premier ministre désignait la lutte contre le chômage et la préservation de l'emploi comme la priorité absolue des dix-huit prochains mois. Nous ne pouvons que nous en féliciter dans le contexte actuel.

L'ampleur de la crise sanitaire a, en effet, fortement affecté le marché de l'emploi. Après une baisse en trompe-l'œil pendant le confinement – un grand nombre de personnes sans emploi ayant interrompu leurs recherches –, le taux de chômage devrait grimper à 9,7 % en fin d'année. Avec la reprise de l'épidémie, l'Insee n'exclut pas qu'il atteigne 10 %, alors même que notre pays connaît, depuis près de cinquante ans, un chômage de masse, que les différentes politiques de l'emploi peinent à enrayer.

Dans ces conditions, la proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui revêt une importance particulière.

Je pense, bien sûr, à son premier volet, qui reprend le pacte d'ambition pour l'insertion par l'activité économique et s'inspire de la volonté du Président de la République de faire passer le nombre des bénéficiaires de l'insertion par l'activité économique de 140 000 à 240 000. La suppression de l'agrément préalable par Pôle emploi ou la mise en place d'un CDI inclusion pour les séniors sont des mesures qui vont dans le bon sens.

Je pense surtout à la prolongation de l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ». Je salue ce dispositif, né dans les années quatre-vingt-dix et relancé par ATD Quart Monde il y a près de dix ans pour en finir avec le chômage de longue durée. Il repose en fait sur une idée assez simple : l'embauche en CDI de chômeurs de longue durée payés au SMIC par le développement d'activités locales via un fonds financé par la réaffectation des dépenses liées au traitement du chômage.

Certains, à l'époque, ont qualifié ce projet de farfelu, voire d'utopique. Mais les grandes réalisations ne sont-elles pas d'abord une utopie ?

Le bilan de la première phase est positif : à la fin de l'année 2018, l'expérimentation avait permis à 1 112 personnes de sortir de la privation d'emploi.

Malgré tout, plusieurs voix s'élèvent pour reprocher au projet d'être un gouffre financier. Mme la rapporteur elle-même estime que, si le dispositif « propose une réponse novatrice et intéressante à la problématique de l'exclusion », il « représente un coût pour les finances publiques » qui rendrait, à date, « sa généralisation difficilement soutenable ».

Mais ce dispositif ne doit pas s'apprécier seulement à l'aune de son aspect financier. Comme l'a rappelé le président du Comité scientifique d'évaluation de l'expérimentation, « l'enjeu prioritaire consiste à ramener à l'emploi les personnes qui en ont été durablement privées et d'apprécier l'impact positif du dispositif sur ces personnes, leur entourage, et plus généralement sur les territoires d'expérimentation ».

La première phase expérimentale a, en effet, montré comment des femmes et des hommes qui allaient très mal ont retrouvé un sens à leur vie et une utilité sociale. Le film de Marie-Monique Robin Nouvelle Cordée, qui a suivi pendant plusieurs années les personnes embauchées par l'entreprise à but d'emploi de Mauléon, dans les Deux-Sèvres, témoigne de cette métamorphose.

Nous ne pouvons ignorer les effets délétères de l'absence d'emploi sur la santé. La perte d'un travail et la difficulté à en retrouver un dégradent la santé des chômeurs : stress, perte de sommeil, problèmes cardiovasculaires, addictions, diabète, dépression… Selon une étude de l'Inserm, de 10 000 à 14 000 décès seraient ainsi imputables au chômage chaque année.

C'est pourquoi nous nous réjouissons de l'extension de cette expérimentation, même si les modalités retenues nous paraissent trop restrictives, qu'il s'agisse du nombre de territoires concernés ou de la durée de la prolongation. Certes, les débats à l'Assemblée nationale ont permis de porter à cinquante le nombre de nouveaux territoires, mais cela nous semble encore bien insuffisant. Nous savons que le conseil d'administration de l'association « Territoires zéro chômeur de longue durée » a d'ores et déjà validé 122 projets en vue de la deuxième étape. Tous ceux qui remplissent les conditions devraient pouvoir accéder au dispositif. Madame la ministre, vous avez assuré à nos collègues de l'Assemblée nationale qu'il serait possible de rediscuter de ce seuil dans deux ou trois ans. Dont acte !

Par ailleurs, les territoires qui auront besoin de trois ans pour se préparer disposeront de moins de cinq ans pour expérimenter le dispositif, ce qui est dommageable.

Nous regrettons, enfin, certaines orientations prises par notre commission des affaires sociales, s'agissant notamment de la suppression du concours obligatoire des départements au financement des emplois supplémentaires créés, du copilotage du préfet ou de la double tutelle. Ces modifications nous semblent antinomiques de l'esprit de l'initiative, qui repose essentiellement sur la confiance faite aux territoires pour identifier les personnes privées d'emploi et les besoins non satisfaits.

Pour ces raisons, nous serons particulièrement attentifs aux débats et au sort réservé aux amendements déposés, notamment ceux du groupe RDSE. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

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