Projet de loi de transformation de la fonction publique
Intervention de Nathalie Delattre - CMP
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Mme Nathalie Delattre. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’heure du bilan du travail parlementaire accompli lors de ces quelques mois d’examen du projet de loi de transformation de la fonction publique, je tiens, tout d’abord, à souligner l’extrême efficacité de notre procédure législative.
Entre son dépôt sur le bureau de l’Assemblée nationale le 27 mars dernier et notre vote d’aujourd’hui, quatre mois ont suffi pour parvenir à un compromis transpartisan sur des sujets aussi sensibles que l’encadrement du droit de grève, la réforme des commissions administratives paritaires ou l’encadrement du temps de travail. Si certains d’entre nous y voient de la précipitation, notre groupe en fait une tout autre lecture, en considérant que ce texte donne force de loi à des propositions restées en souffrance pendant plusieurs années.
Il suffit de relire les comptes rendus des auditions de commission ou le compte rendu de la séance pour en prendre conscience.
À l’Assemblée nationale comme ici, à l’image de notre représentativité, les points d’opposition sont connus depuis longtemps : le poids des syndicats dans la fonction publique, l’articulation entre un statut de la fonction publique territoriale et l’autonomie des collectivités, l’équilibre entre les droits et les obligations des agents, ou encore le périmètre de leur statut. En réalité, la question reste toujours la même : quelle forme donner à l’État pour qu’il satisfasse les besoins de nos concitoyens ?
« Ce qu’il faudrait faire aujourd’hui, c’est un État plus ramassé, mais plus efficace dans l’accomplissement des missions qui sont les siennes » déclarait M. Jacques Toubon le 3 mai 1983, en réponse à M. Anicet Le Pors. Quelle intemporalité, me direz-vous !
Il faut donc saluer notre rigueur collective, qui nous a conduits à ne pas laisser errer davantage nos débats sur des sujets pour lesquels nous connaissons ô combien la position des uns et des autres et à nous concentrer sur des problématiques qui nécessitaient un consensus.
C’est le cas du contrôle de déontologie pour les mobilités entre les agents du secteur privé et du secteur public. Dès lors que l’on encourage davantage ces mobilités, notamment depuis la loi du 3 août 2009, il fallait nécessairement adapter un dispositif qui avait été pensé au moment où celles-ci avaient vocation à rester marginales.
Il est clair que, depuis 1983 et, plus encore, depuis 1946, les parcours professionnels des Français ont évolué en s’allongeant et en se diversifiant. La fonction publique ne peut rester hermétique à ces changements, et c’est pourquoi, au sein du groupe du RDSE, nous avons toujours défendu une approche pragmatique en la matière : autoriser les mobilités tout en prévenant les conflits d’intérêts.
Le système finalement retenu devrait permettre de simplifier la vie de la majorité des agents souhaitant se reconvertir professionnellement, à l’exception de « ceux dont la nature ou le niveau de fonction le justifient ».
Nous saluons la version finale de l’article 16 retenue par la CMP – cela m’offre l’occasion de saluer également le travail de nos rapporteurs –, notamment l’inscription d’un contrôle en cas de réintégration d’un fonctionnaire et la publicité de la HATVP. Nous verrons à l’usage si les sanctions prévues et la composition du nouveau collège permettent de mettre fin aux travers attribués à la commission de déontologie.
Alors que, en 1983, on débattait de la suppression de la catégorie D, ce sujet déontologique a fait émerger la question de la reconnaissance d’une catégorie A+. Nous pensons qu’une telle reconnaissance serait opportune, dès lors qu’elle concernerait les catégories d’emploi les plus proches du pouvoir politique, afin d’appliquer à celles-ci des règles spécifiques.
Enfin, le maintien d’une obligation de documenter le phénomène de pantouflage et l’obligation de remboursement de frais de scolarité à l’article 16 ter constituent une première étape dans la restauration de la force de l’engagement décennal.
Je voudrais également souligner quelques avancées en matière sociale : une meilleure prise en compte du handicap des agents publics, pour laquelle le Sénat a fourni un travail décisif, mais également certaines évolutions législatives destinées à améliorer l’articulation entre vie de famille et vie professionnelle pour les femmes et adapter les avantages familiaux à la nouvelle fragilité des couples. Sur ce dernier point, je fais référence à l’adaptation du supplément familial de traitement, introduite sur notre initiative, qui devrait contribuer à apaiser les relations financières après la séparation d’un couple d’agents publics.
Nous retenons par ailleurs des avancées contrastées selon la fonction publique concernée.
Dans la fonction publique territoriale, les avancées sont considérables pour les employeurs locaux, grâce au maintien par la CMP des apports du Sénat dans un texte déjà imprégné de la sensibilité du secrétaire d’État à ces sujets. Nous espérons que le texte permettra de faciliter le recrutement d’anciens agents du ministère de l’intérieur dans les rangs des policiers municipaux, un sujet que j’avais soulevé dès l’examen en commission.
Concernant la fonction publique hospitalière, nous retenons également quelques avancées, telle que la création d’une prime collective, bien que la situation de départ soit particulièrement dégradée.
Concernant la fonction publique d’État, enfin, les portées des modifications introduites sont les plus difficiles à anticiper et divisent les membres de notre groupe.
Pour certains d’entre nous, la marginalisation des commissions administratives paritaires, ou CAP, et les mesures visant à renforcer le recours aux contractuels menacent à terme le statut.
D’autres y voient au contraire des moyens de revitaliser une machine étatique, par la diversification des modes de recrutement et le renforcement de la notion de carrière, qui peuvent s’avérer être un moyen de sauver le statut. Ces derniers considèrent pour autant qu’une attention particulière doit être portée aux risques de précarisation des contractuels, qui sont finalement les plus vulnérables de nos agents publics.
Dans l’attente que l’avenir infirme ou confirme ces dernières observations, les votes seront donc divisés au sein du groupe du RDSE, avec une majorité d’abstentions, quelques voix pour et quelques voix contre, comme il sied à la liberté de vote de notre groupe. (Applaudissements sur le banc des commissions.)
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