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Projet de loi de finances pour 2021

 

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous traversons, depuis dix mois déjà, un scénario digne d'un film de science-fiction. En mars dernier, il a fallu préserver la santé de nos concitoyens. C'était nécessaire, mais nous ressentons aujourd'hui les conséquences de ce choix, même si nous ne pouvons encore en mesurer toute l'ampleur, d'un point de vue non seulement humain, mais aussi social, économique ou budgétaire, la pandémie étant loin d'être terminée.

Nous avons fait le choix du confinement à deux reprises, pour sauver des vies, je le répète. Des mesures budgétaires ont aussitôt été prises pour financer l'urgence sanitaire et compenser les pertes brutales de revenus et de chiffre d'affaires. Beaucoup a été fait lors de la première vague. Malheureusement, nombre de nos compatriotes, les plus fragiles, sont cruellement atteints par ce deuxième confinement et se demandent s'ils pourront en surmonter le coût.

Afin d'en contrecarrer les effets, le projet de loi de finances pour 2021 s'inscrit dans la continuité des mesures d'urgence entérinées par les quatre projets de loi de finances rectificative successifs, sans oublier le plan de relance, inscrit dans le budget général pour 2021 comme une mission à part entière, pour un montant de 36,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement.

Alors que la sortie du premier confinement durant l'été avait apporté une dynamique de reprise et que les analyses prospectives présentées en commission des finances laissaient entrevoir un rétablissement budgétaire, le deuxième épisode de confinement nous oblige à revoir à la baisse nos hypothèses de rebond.

La pandémie est venue bouleverser intégralement toutes les prévisions, et la discussion budgétaire en porte les stigmates. La situation économique et financière de notre pays s'est dégradée avec cette crise sanitaire, mais la loi de finances pour 2021, si elle répond à l'urgence et à la situation conjoncturelle, n'amorce aucun changement de direction par rapport à la situation de l'avant-crise.

Les crédits des missions les plus significatifs restent ceux de la mission « Enseignement scolaire », avec 54,9 milliards d'euros, soit une progression de 1,4 milliard d'euros, de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », pour 26 milliards d'euros, de la mission « Cohésion des territoires », pour 16,9 milliards d'euros, et de la mission « Plan de relance », pour 22 milliards d'euros.

La mission « Justice » progresse également, avec 8,2 milliards d'euros et une hausse notable des effectifs, avec 1 359 emplois équivalents temps plein supplémentaires.

Les mesures du volet « rémunérations » du Ségur de la santé atteignent 8,8 milliards d'euros et la réaffectation de la CSG à la branche dépendance 2,3 milliards d'euros.

Je le rappelle, les projets de loi d'urgence sanitaire ont permis de pallier les conséquences sociales de la crise sanitaire, même si le coût de la dette qui en découle demeure une inquiétude. Ainsi, le remboursement des 10 milliards d'euros apportés par l'Union européenne dès 2021 pourrait représenter des annuités de l'ordre de 2,5 milliards d'euros à compter de 2028.

Mais revenons aux mesures budgétaires en tant que telles. La baisse annoncée de 10 milliards d'euros des impôts de production des entreprises est maintenue, avec pour objectif affiché la souveraineté et la relocalisation des emplois industriels.

Ainsi, l'article 3 prévoit la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et un ajustement de la contribution économique territoriale (CET) pour cet impôt qui s'élève, en France, à 77 milliards d'euros, soit le double de la moyenne de l'Union européenne. L'article supprime la part régionale de la CVAE, qui représente 50 % du total, et lui substitue une fraction supplémentaire de TVA. Le plafond de la CET passe de 3 % à 2 %.

Avec moi, les membres du groupe du RDSE regrettent qu'aucune réelle contrepartie sociale ou écologique ne soit exigée. Nous redoutons que cette mesure ne favorise les grandes entreprises, alors que ce sont véritablement les plus petites d'entre elles qui sont en danger, car elles sont davantage pénalisées par le deuxième confinement. Elles représentent pourtant un gisement d'emplois non délocalisables, précieux pour maintenir la vie et le lien social au cœur de nos territoires. Déjà, de très nombreux artisans, commerçants ou prestataires de services estiment qu'ils ne seront pas en mesure de rembourser les prêts garantis par l'État.

Leur survie est compromise, à l'image du secteur de la culture, du tourisme, des loisirs, des festivals, de la restauration, des services à la personne, pour ne citer que ces quelques exemples. La plupart se demandent comment ils seront en mesure de payer à l'avenir l'échéancier des cotisations de l'Urssaf, qui n'ont pas été annulées, mais seulement reportées.

Malgré les 4 milliards d'euros consacrés à l'entrée dans la vie professionnelle des jeunes et les 5 milliards d'euros prévus pour le volet « cohésion » centré sur la sauvegarde de l'emploi, le chômage partiel ou la formation, nous craignons que les plus fragiles ne paient le prix fort des conséquences de ce deuxième confinement.

Autre lacune de ce budget pour 2021, l'insuffisance des moyens octroyés aux collectivités territoriales non seulement pour faire face aux surcoûts consécutifs à la gestion de la crise sanitaire, mais aussi pour tenir une place prépondérante dans la relance économique.

Au travers des aides et de la reprise des investissements, elles auraient pu jouer un rôle moteur, un rôle de levier, pour contribuer à la relance économique, en assurant le maintien des investissements et de la commande publique. La loi de finances ne tient pas ses promesses en la matière, et le compte n'y est pas pour les collectivités territoriales !

Néanmoins, nous ne pouvons que saluer un certain nombre de mesures en discussion, comme l'article 2 quinquies, qui vise à lever les gages de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ou encore l'article 3 bis, qui tend à proroger les dispositifs de soutien à la presse écrite jusqu'à la fin 2023.

L'article 3 quater prévoit l'élargissement du champ de la déduction pour épargne de précaution aux aquaculteurs et aux centres équestres, autant de mesures qui seront utiles concrètement, tout comme celles qui sont prises en faveur des entreprises du secteur du théâtre ou du spectacle, à l'article 3 undecies.

Pour ce qui concerne les ressources affectées, l'article 22 fixe le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des variables d'ajustement. Le montant de la DGF stagne avec 26,76 milliards d'euros en 2021, contre 26,85 milliards d'euros en 2020. Il convient de ne pas perdre de vue que cette dotation représentait, voilà dix ans, près de 40 milliards d'euros.

La DGF représente 62 % de l'ensemble des prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales. En tout, cela représente 43,25 milliards d'euros, dont 6,55 milliards d'euros pour le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), ou encore 2,91 milliards d'euros pour la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle et 3,74 milliards d'euros de dotations pour l'équipement scolaire, l'exonération d'impôts locaux et le soutien exceptionnel au bloc communal pendant la crise sanitaire.

Je salue également la revalorisation de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR), pour un montant de 90 millions d'euros chacune, même s'il me semble qu'un effort plus substantiel doit être consenti en faveur des communes rurales, la dotation de solidarité rurale par habitant étant bien inférieure à la dotation de solidarité urbaine.

C'est une évidence, la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2021 se caractérise principalement par une très forte inquiétude. Selon les différentes hypothèses retenues concernant la situation sanitaire ou encore la durée ou la sévérité du confinement effectif, les prévisions de croissance varient et restent fragiles.

La prévision de solde effectif est de –6,7 % du PIB, avec un déficit structurel de 3,6 %, qui représenterait plus de la moitié du total, contre 1,2 % en 2020 et 2,2 % en 2019. Une telle hypothèse est jugée « atteignable » par le Haut Conseil des finances publiques.

La perte d'activité de novembre serait moindre que celle du printemps : 12 % au lieu de 30 % en avril. Selon les données de la Banque de France, elle serait plus modérée que celle qui est redoutée, notamment dans le secteur de la construction, où l'on annonce une baisse de 8 % contre 65 % en avril, ou encore dans les services marchands, avec une diminution de 17 % contre 27 % au printemps. En revanche, pour les commerces de gros et de détail, dont la restauration et l'hébergement, la Banque de France annonce une baisse d'activité de 40 %, contre 46 % en avril.

Dans ces conditions, le déficit public devrait atteindre 11,3 % du PIB, pour un endettement de 119,8 %. Nous devons tabler sur des prévisions de croissance prudentes à l'issue du reconfinement.

En conclusion, nous pouvons affirmer que, pour 2021, l'État se finance autant par l'endettement que par l'impôt. Mais chacun le sait bien ici, les emprunts d'aujourd'hui sont les impôts de demain.

Conscient que notre pays s'inscrit dans un effort financier somme toute plus faible que celui déployé par certains de nos voisins européens, le groupe du RDSE sera très soucieux, au cours de la discussion budgétaire, de maintenir la dynamique de nos territoires et la solidarité envers les plus fragiles de nos concitoyens, dans un souci d'équité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

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