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Projet de loi visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'espace Schengen regroupe vingt-sept États européens, depuis le cercle arctique jusqu'au caillou de Gibraltar, soit 3,5 millions de traversées des frontières chaque jour. Il assure la libre circulation des marchandises et des individus entre ses États membres, le franchissement des frontières intérieures s'effectuant librement.

C'est un défi de taille pour les États membres que d'assurer la lutte contre la fraude douanière, celle-ci impliquant une surveillance accrue des frontières extérieures : aériennes, maritimes, et terrestres. C'en est un également d'assurer une coordination policière, judiciaire et douanière, tout en respectant la protection des libertés individuelles et des données personnelles.

Le projet de loi visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces a un double objectif : d'une part, corriger l'inconstitutionnalité de l'article 60 du code des douanes, mise en lumière en septembre dernier à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité et, d'autre part, pérenniser le cadre des agents des douanes, lequel doit devenir caduc le 1er septembre prochain.

La direction générale des douanes et des droits indirects compte 16 000 agents, pour un budget de 1,6 milliard d'euros par an. Les techniques de fraude étant toujours plus sophistiquées, les contrôleurs sont confrontés à des trafics illégaux difficilement détectables au milieu du fret légal : stupéfiants, tabac, contrefaçons, objets d'art, antiquités, animaux, sans oublier le trafic d'êtres humains.

Si la numérisation de l'économie multiplie les moyens d'investigations, dans le même temps elle démultiplie les outils de contournement des contrôles douaniers.

Je suis convaincu pour ma part que la clé de la réussite réside dans le renforcement des moyens humains de la douane française.

Des modifications substantielles ont été apportées, à l'article 2, à la réécriture du droit de visite douanière, jugé inconstitutionnel, mais aussi, aux articles 9 à 12, au contrôle douanier dans l'espace numérique. L'article 7 prévoit quant à lui la création d'une réserve opérationnelle sur le modèle de celle qui existe dans l'armée ou la police.

Le texte rapproche le code des douanes de la procédure pénale, en prévoyant notamment l'information du procureur de la République.

L'article 1er redéfinit la zone terrestre du champ d'action des services douaniers, dite « rayon de douane », soit 40 kilomètres à partir du littoral ou de la frontière terrestre. Cependant, que se passera-t-il si cette zone ne correspond pas à la territorialisation du procureur attaché à un tribunal bien précis ? Comment surmonter cet obstacle dans le feu de l'action ?

L'article 2 rend le droit de visite douanière conforme à la Constitution, au moyen des nouveaux articles 60 à 60-10 du code des douanes, qui précisent la zone géographique concernée et les conditions des visites, après information du procureur.

Ce dernier point me semble peu réaliste, car la frontière est floue entre l'information et l'autorisation. Je m'interroge donc sur son efficacité opérationnelle. N'aurait-il pas fallu apporter des précisions sur le moyen d'informer le procureur ?

À la frontière espagnole, les douaniers devront-ils attendre l'accord du procureur avant de contrôler des suspects ? Comme Nathalie Delattre l'a souligné précédemment, si la brigade d'Arcachon s'arrête au premier péage payant de l'A63, le procureur compétent sera-t-il celui des Landes ou celui de la Gironde ? Autant de questions sans réponse.

Au tribunal de Perpignan, combien de procureurs seront-ils uniquement occupés par les demandes douanières ? Je redoute que cette nouvelle disposition ne déclenche une avalanche administrative, ayant pour conséquence l'obligation d'embaucher des personnels consacrés aux tâches administratives plutôt qu'aux tâches opérationnelles. Ne risque-t-on pas ainsi de faciliter la vie des trafiquants ? Je n'évoque pas par ailleurs – cela a déjà été fait – les procédures pénales, qui ne vont pas manquer.

Revenons au texte. L'article 6 autorise la retenue temporaire d'argent liquide et permet d'appréhender les circuits financiers des activités criminelles sur le territoire. Le titre II rénove le cadre d'enquête des douanes, en leur permettant de démanteler des réseaux criminels, y compris ceux qui utilisent la chaîne de blocs renforçant l'anonymat des transactions.

L'article 10 prévoit la saisie des données numériques et le gel des données hébergées sur un serveur distant. Le nouvel article 10 bis permet des échanges entre l'autorité judiciaire et la douane.

Aux termes de l'article 11, il est proposé de conserver plus longuement – au maximum quatre mois – les données des lecteurs automatisés de plaques d'immatriculation des convois d'acheminement de marchandises illicites de type go fast.

Le nouvel article 11 bis introduit par notre collègue Jérôme Bascher permet l'échange d'informations entre les douanes, la police et la gendarmerie nationales pour surveiller les frontières.

L'article 12 vise les infractions sur internet, en renforçant les pouvoirs d'investigation et de sanction envers des intermédiaires – si l'on peut dire – comme les opérateurs de plateformes en ligne. C'est essentiel en cas de demande de retrait des contenus ayant servi à commettre une infraction.

Quant à l'article 13, il réforme le délit de blanchiment douanier des flux financiers illicites correspondant au financement du terrorisme.

Avant de conclure, déformation professionnelle oblige, je souhaiterais connaître le rapport coût-bénéfice d'un agent des douanes. Combien de recettes chaque douanier rapporte-t-il dans les caisses de l'État ?

Ces professionnels évoluent dans un environnement de travail pénible, éprouvant, dangereux, bruyant, tout en devant rester concentrés pour assurer à la fois leur efficacité et leur sécurité. Les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen s'associent à moi pour saluer la qualité du travail des douaniers, acteurs essentiels de la lutte contre tous les trafics.

Les membres du groupe RDSE reconnaissent la nécessité de légiférer rapidement sur la question des douanes, bien que leurs amendements n'aient pas été adoptés. Malgré les réserves que j'ai soulevées au cours de mon intervention, nous approuverons majoritairement ce texte. Néanmoins, il faudra prévoir un premier bilan très rapidement après la mise en œuvre de ses dispositions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

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