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Question d'actualité sur les états généraux de la justice

M. Jean-Claude Requier. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Après le Grenelle de l'éducation, le Ségur de la santé ou encore le Beauvau de la sécurité, le Président de la République vient d'annoncer l'organisation, à la rentrée, d'États généraux de la justice, pour poursuivre le passage en revue des politiques publiques.

Mon groupe se félicite de cette annonce, tant le fossé entre nos concitoyens et nos institutions judiciaires semble se creuser. Pourtant, la relation de confiance est essentielle pour légitimer les décisions qui sont rendues au nom du peuple français.

Des jurisprudences récentes ont pu susciter l'incompréhension ou l'émotion dans l'opinion. Toutefois, dans un État de droit, la justice ne se confond pas avec la morale. Elle applique la loi : dura lex, sed lex.

Surtout, pour nous, républicains de tous bords, il n'y a pas à choisir comme d'aucuns l'ont fait entre forces de l'ordre et magistrats. Tous sont des fonctionnaires dévoués, qui font vivre le service public et défendent nos valeurs républicaines au quotidien. Je tiens à les saluer et à les remercier, et non à les opposer, au moment où nous devons renforcer notre cohésion nationale.

Monsieur le Premier ministre, ce dont notre justice n'a pas besoin, c'est d'une énième consultation véhiculant son lot de promesses qui n'aboutiront pas, comme nous en avons trop connu, et qui décevront une nouvelle fois les professionnels du droit comme les citoyens. Pour notre part, nous défendons une justice plus accessible, plus simple et plus efficace.

Monsieur le Premier ministre, comment entendez-vous restaurer la confiance entre nos concitoyens et notre justice ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Requier, le 16 juillet 2020, il y a bientôt un an, à l'occasion de ma déclaration de politique générale devant le Sénat, je déclarais – permettez-moi de me citer, même si ce n'est pas l'usage (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) –, que « la justice, c'est l'État, et l'État, c'est la justice ».

Depuis de nombreuses années, l'État ne donne pas à la justice ses moyens d'intervention. Il en résulte que l'action des forces de l'ordre se trouve parfois sans suite et que des situations d'impunité peuvent être ressenties de manière inacceptable par certains de nos concitoyens, par les élus des territoires et, au premier chef, par les maires.

J'entends accélérer la mise en œuvre de la loi de programmation et de réforme pour la justice, par le déploiement, dès 2021, de moyens nouveaux affectés au budget de ce ministère.

Il s'agit, en particulier, de rendre plus rapide et effective la réponse judiciaire, d'améliorer la politique des peines, de garantir la dignité et la réinsertion des prisonniers et de moderniser le fonctionnement des juridictions. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio s'exclame.)

Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est ce que nous nous attachons à faire.

Les États généraux de la justice ne seront pas, comme j'ai pu l'entendre, une énième manifestation qui pourrait décevoir les professionnels. Permettez-moi de vous rappeler qu'ils ont été demandés au Président de la République par les deux plus hauts magistrats de France : la Première présidente de la Cour de cassation et le procureur général près ladite cour.

Le Président de la République, précisément parce que le renforcement de l'autorité judiciaire et les moyens consacrés au service public de la justice sont au cœur de l'action de ce Gouvernement, a décidé de faire suite à cette demande.

Je vous remercie, monsieur le sénateur, de la modération de vos propos, qui ne me surprend pas. Il faut poser et objectiver le débat et rappeler que, dans une république démocratique comme la nôtre, la séparation des pouvoirs et le respect de l'État de droit doivent lier l'ensemble de nos concitoyens.

J'entends trop, y compris émanant du champ politique, des propos tout à fait inacceptables.

M. David Assouline. Dites-le à M. Darmanin !

M. Jean Castex, Premier ministre. C'est dans la sérénité que, ensemble, nous devons redonner à notre justice les moyens qui lui ont été trop longtemps comptés.

La semaine dernière, nous avons eu plusieurs questions sur ce sujet, ici même, au Sénat, Mme la sénatrice Muriel Jourda ayant posé une question sur les moyens de la justice.

Permettez-moi de faire un petit rappel sur les dix dernières années. (Marques d'ironie sur les travées des groupes Les Républicains et SER.) Sur cinq ans, entre 2007 et 2012, les pouvoirs publics ont donné 700 millions d'euros de plus à la justice ; sur les cinq années suivantes, entre 2012 et 2017, quelque 840 millions d'euros de plus ; sur les quatre dernières années, c'est-à-dire depuis le début de ce quinquennat, 1,4 milliard d'euros de plus.

Cela a été notamment permis par la hausse de 8 % du budget de la justice, votée en loi de finances pour 2021. Nous allons poursuivre cet effort, parce que le pays a besoin d'une justice efficiente.

Vous le savez, nous avons augmenté de manière tout à fait significative le nombre de places en prison, soit par les programmes en cours, soit par les 8 000 places supplémentaires annoncées par mes soins et par ceux du garde des sceaux, en Alsace, il y a plusieurs semaines.

Nous faisons travailler ensemble policiers et magistrats. Vous l'avez dit, monsieur le sénateur, il ne peut, dans un État de droit démocratique, y avoir d'opposition entre ces institutions. Cette question est centrale. Sur ce terrain, comme sur les autres, nous agissons. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour la réplique.

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le Premier ministre, permettez-moi une remarque sur le titre des États généraux de la justice. « Vendôme » ou « place Vendôme » aurait fait trop chic ou trop bruyant, et « assises », trop judiciaire. « États généraux », en revanche, c'est plus historique et plus rassembleur. (M. Pierre Charon ironise.)

En conclusion, permettez-moi de faire miens les propos de M. Jérôme Gavaudan, président du Conseil national des barreaux, selon lequel les États généraux de la justice ne doivent pas devenir « un lieu de pugilat politique ou électoraliste ». (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

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