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Projet de loi de finances pour 2023 - mission "Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales"

M. Henri Cabanel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelle agriculture voulons-nous et quels moyens sommes-nous prêts à lui accorder ? Depuis que je siège dans cet hémicycle, j’essaie inlassablement de sensibiliser aux enjeux du secteur agricole et de la méthode à adopter ensemble pour des résultats efficaces.

Les enjeux sont externes, qu’il s’agisse de santé publique, d’indépendance alimentaire, d’adaptation au réchauffement climatique, de préservation de l’environnement et de la ressource en eau, d’emplois non délocalisables, de préservation du foncier, de recherche et d’innovation ; ils sont aussi internes quand ils portent sur les revenus, l’emploi rémunérateur, le bien-être ou la transmission.

S’agissant de la méthode, nous n’appliquons pas suffisamment celle d’une évaluation des effets de nos décisions, car les chiffres signifient peu au regard des enjeux.

Ce budget, par exemple, est en hausse de 15 %, mais les membres des différentes commissions ont quasi unanimement indiqué qu’il n’était pas à la hauteur.

Des questions se posent : quelle vision du bien-être de nos agriculteurs avons-nous ? Quand ouvrirons-nous le chantier du prix rémunérateur et du revenu pour aller au-delà des lois Égalim 1 et 2 ? Quelles actions mener pour favoriser la transmission des exploitations ? Quelle image positive pouvons-nous offrir aux jeunes agriculteurs ?

Quid de la loi foncière ? Depuis des années, je propose des moyens supplémentaires aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), via les établissements publics fonciers, pour qu’elles assument pleinement leur rôle dans l’installation et le portage foncier, et ce en toute transparence.

Concernant la prédation du loup, onze pays européens se sont réunis hier à l’invitation du Cercle 12 pour demander une régulation. Quelle est votre position, monsieur le ministre, concernant l’évolution de la convention de Berne, telle qu’elle est demandée ?

Quelles mesures de simplification pouvons-nous encore initier ? Comment, dans un contexte de concurrence exacerbée et d’enjeux climatiques lourds, pouvez-vous plafonner le budget destiné à la recherche ? En effet, le plafonnement du Casdar est fixé à 6 millions d’euros, alors que pour la seule année 2022, la prévision des recettes de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitants agricoles, qui alimente le Casdar, serait estimée entre 143 millions et 148 millions d’euros.

Et l’eau ? Alors qu’elle se raréfie, il faudrait anticiper et parler vrai. Le partage de cette ressource est fondamental et ses usages doivent être raisonnés. La piste de la réutilisation des eaux d’assainissement, par exemple, doit être véritablement étudiée, comme nous l’a d’ailleurs montré l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) à Pech Rouge dans l’Aude. Les procédures doivent être simplifiées ; nous sommes en retard sur ce sujet.

Concernant la gestion des risques, le dossier n’est pas nouveau. Il aura fallu dépenser des millions d’euros, à la suite des épisodes de gel, de grêle, de sécheresse ou d’inondation, pour enfin répondre à la détresse des agriculteurs par la mise en place d’un dispositif universel de couverture des risques.

Cependant, où en est-on s’agissant de la moyenne olympique ? Monsieur le ministre, quelles avancées ont été réalisées avec l’Europe, puisque, in fine, la décision en dépend ?

Autant de questions et de réponses à apporter pour penser le bien-être de nos agriculteurs.

En septembre 2019, la Mutualité sociale agricole (MSA) a révélé l’effroyable : 605 suicides pour la seule année 2015.

Depuis lors, silence radio sur les chiffres, car la « grosse machine » s’est enfin mise en route. Et c’est très bien !

Le film Au nom de la terre, d’Édouard Bergeon, a mis des images et des prénoms sur l’innommable.

Le débat dans cet hémicycle à l’occasion de l’examen de ma proposition de loi, le rapport rédigé par ma collègue Françoise Férat et moi-même, ainsi que celui de notre ancien collègue député Olivier Damaisin, ont sorti de l’oubli les milliers de femmes et d’hommes qui ont choisi de mettre fin à leur vie. Nous avons collectivement porté leurs voix et ouvert la voie.

La feuille de route de prévention du mal-être et d’accompagnement des populations agricoles en difficulté a ainsi été annoncée en novembre 2021 et un coordinateur, Daniel Lenoir, a été nommé.

Ma collègue Françoise Férat et moi-même l’avons longuement rencontré hier et il nous a rassurés sur votre volonté d’avancer. Cependant, sa mission s’achève en février 2023. Et après, monsieur le ministre ?

Il est absolument nécessaire de prévoir une évaluation des mesures. Comment la réaliser ? Grâce à un délégué interministériel ? à une mission ministérielle ? ou encore à un groupement d’intérêt public, qui aurait l’avantage de réunir l’ensemble des acteurs autour de la table ?

Je pense aussi aux associations, comme Solidarité Paysans ou Deux mains pour Demain, qui œuvrent quotidiennement pour aider des agriculteurs en difficulté ou des familles endeuillées. Quel soutien leur apportons-nous réellement ?

Comme les rapporteurs, je regrette la confusion portant, dans ce budget, sur les sommes dédiées à ces mesures. J’aurais également souhaité un document unique détaillant les financements par action, par exemple pour l’aide à la relance des exploitations agricoles, dont le budget prévu est à la baisse. Il s’agit pourtant d’un dispositif d’aide à la relance d’exploitations en difficulté, mais – et c’est un mal français – il est trop méconnu et complexe pour être utilisé.

Malgré cela, mon groupe, le RDSE, ne votera pas contre ce budget, en hausse, même s’il n’est pas à la hauteur des enjeux : il s’abstiendra.

Très symboliquement, j’ai déposé un amendement qui reprend la première proposition de notre rapport : faire de l’agriculture une cause nationale en 2023.

Les paysans nous nourrissent. Leur dédier une année d’actions serait à la hauteur de leurs missions et de nos ambitions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

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