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Débat "Quel bilan parcoursup ?"

 

M. Bernard Fialaire. Madame la ministre, à l'occasion de la dernière rentrée scolaire, devant les recteurs d'académie, le Président de la République a déclaré : « Nous rêvons d'une école qui fasse réussir nos enfants et qui fasse réussir la France. »

Oui, la réussite des enfants est à la fois une histoire individuelle et une aventure collective, qui mobilise d'importants moyens et des politiques publiques qu'il nous faut sans cesse interroger.

Sans anticiper le très proche examen par le Sénat du projet de loi de finances pour 2023, je soulignerai simplement qu'avec 59,7 milliards d'euros, l'éducation nationale consomme la part la plus importante du budget de l'État, si je mets de côté la mission « Remboursements et dégrèvements ». Un tel montant nous invite en effet à regarder de près ce qui marche et ce qui ne marche pas.

Ce soir, il est question de débattre de l'orientation post-bac, une phase déterminante pour le futur de chacun de nos jeunes concitoyens. Dans l'imposant système de l'éducation nationale, quel bilan pouvons-nous tirer de Parcoursup, après quatre années de mise en œuvre ?

Selon les chiffres publiés sur la plateforme, 936 000 candidats ont été concernés en 2022 ; 3,8 millions de propositions d'admission ont été faites ; 93 % de lycéens ont été contentés en phase principale.

À l'issue de la phase complémentaire, seuls 160 bacheliers seraient restés sans proposition. C'est peu, mais mieux que l'année précédente, et encore trop pour les familles concernées. On observe toutefois que les commissions d'accès à l'enseignement supérieur (CAES) jouent bien leur rôle dans l'accompagnement de ces élèves sans solution. J'en profite pour saluer leur travail.

Parcoursup semble globalement fonctionner, en évitant certains écueils de l'ancien dispositif APB, jugé à l'époque totalement déshumanisé et trop complexe.

Cependant, si les quotas d'affectation des élèves sont remplis, ce système d'orientation respecte-t-il un principe républicain fondamental, celui de l'égalité des chances pour l'accès aux études supérieures ? Des orientations ne seraient-elles pas davantage subies plutôt que voulues ? Ainsi, 28 % des élèves se déclarent insatisfaits de leur sort d'admission dans le supérieur.

Parcoursup n'évite pas la sélection, selon un rapport de la Cour des comptes de 2020 sur l'orientation des étudiants. Certains de mes collègues l'ont rappelé, la façon dont procèdent les commissions d'examen des vœux n'est pas totalement transparente. La publication ex post des critères retenus à l'issue de la procédure d'inscription ne suffit pas à garantir un traitement non sélectif.

Si le Conseil constitutionnel a approuvé le principe du secret de la délibération des jurys, il serait cependant souhaitable de définir certains des paramétrages retenus par les commissions d'examen des vœux et d'en écarter certains. Je pense en particulier au critère du lycée d'origine, parfois utilisé pour le départage dans les filières non sélectives en tension.

Enfin, en amont de Parcoursup, et bien que l'article L. 313-1 du code de l'éducation affirme le droit au conseil en orientation et à l'information sur les enseignements, il est urgent de renforcer la phase d'information individualisée des élèves durant leurs deux dernières années de lycée. Les politiques publiques en la matière devraient notamment mieux prendre en compte les difficultés propres aux élèves des milieux socialement défavorisés.

Il existe un phénomène bien connu d'autocensure chez les élèves les moins favorisés concernant leurs choix d'orientation. Par ailleurs, plus de la moitié d'entre eux se retrouvent seuls à saisir leurs données sur Parcoursup, contrairement aux élèves des milieux favorisés, dont les deux tiers sont épaulés par leurs parents.

Pour conclure, mes chers collègues, je n'oublie pas le problème du stress, de plus en plus répandu chez les élèves.

Il existait auparavant chez les lycéens une sorte d'insouciance, dont nous avons nous-mêmes profité. Certes, le système d'entrée à l'université sur le mode du « premier arrivé, premier servi » n'était pas juste. Cependant, l'obtention du bac était davantage un moment de libération que la promesse d'une phase d'angoisse. En effet, tout comme APB, Parcoursup suscite encore beaucoup d'inquiétude, chez les parents aussi...

Mercredi dernier, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a rappelé devant notre commission de la culture, de l'éducation et de la communication l'importance du bien-être à l'école. Je partage sa préoccupation.

Madame la ministre, vous le savez, depuis la pandémie, l'attente est immense sur cet aspect de la vie scolaire qui n'est pas suffisamment pris en compte. Par conséquent, le groupe du RDSE compte sur vous pour mettre en œuvre des politiques visant à redonner aux jeunes l'espoir de tous les possibles. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Alain Richard applaudit également.)

Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je ressens comme vous l'ardente obligation de permettre à nos étudiants de réussir, d'accroître l'égalité des chances et d'accès à l'enseignement supérieur, dans une plus grande transparence.

Nous n'envisageons pas la transparence comme un outil visant des enseignants qui profiteraient, selon certains, de l'opacité du dispositif pour effectuer une sélection discriminante. Comme vous, je pense que la transparence peut être un levier pour améliorer l'accompagnement à l'orientation, pour rendre les résultats de Parcoursup plus prévisibles et, finalement, pour réduire le stress ressenti par les lycéens. Nous allons travailler en ce sens.

Parcoursup a accompagné depuis cinq ans les formations afin que les critères d'analyse des candidatures soient mieux compris. Là où il n'y avait rien, nous avons créé des attendus, puis prévu l'obligation d'afficher les critères. Nous irons encore plus loin, comme je l'indiquerai dans ma réponse finale.

Accroître la transparence est évidemment nécessaire. Mais je tiens aussi à préserver le secret de la délibération collégiale des enseignants, que vous avez évoquée. Il ne s'agit pas d'un réflexe corporatiste, et encore moins d'une volonté de sauvegarder l'opacité. Nous avons simplement la conviction que la délibération des enseignants est un acquis, que le Conseil constitutionnel a reconnu – vous l'avez rappelé –, et que la garantie d'un regard humain évite l'automatisation que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) avait reprochée au dispositif APB.

Ne cédons pas collectivement à cette caricature consistant à jeter injustement l'opprobre sur les milliers d'enseignants qui procèdent à l'examen des dossiers avec détermination et la volonté chevillée au corps d'accueillir et de faire réussir leurs futurs étudiants.

J'insiste sur la place donnée aux étudiants boursiers dans la loi ORE et Parcoursup, sur la volonté de favoriser les cordées de la réussite ainsi que sur l'accompagnement mis en place à destination des enseignants du secondaire et des parents d'élèves. Des progrès restent à faire, et ils seront faits. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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