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Projet de loi de finances pour 2019-2

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, pour le Gouvernement et le Parlement, la présentation et le vote d'un budget constituent l'acte majeur de l'année, celui qui sous-tend toute la politique gouvernementale et dessine les frontières des majorités et des oppositions.

Comme les années précédentes, il convient de replacer l'examen du projet de loi de finances dans un contexte historique, économique, social et financier à l'échelon tant national qu'international.

L'environnement international n'a jamais été aussi perturbé et incertain, avec des foyers de conflit au Moyen-Orient, une politique isolationniste des États-Unis, une volonté expansionniste de la Chine et un manque évident de cohésion en Europe.

Sur le plan économique, on assiste à une complexification des échanges internationaux, à une plus grande volatilité des cours du pétrole et des matières premières, à un tassement des perspectives de croissance en Europe ainsi qu'à la persistance de nos faiblesses structurelles dans le secteur industriel.

Le contexte historique national, c'est en fait l'état des lieux dégradé de la maison France au début de ce quinquennat en termes de dette, de déficit public, de balance commerciale et de niveau de chômage. Les gouvernements précédents, malgré des efforts parfois méritoires, n'ont pas réussi à inverser les tendances négatives de ces indicateurs.

C'est le défi que le Gouvernement doit relever : réussir là où ses prédécesseurs ont échoué.

Ce constat devrait conduire ceux qui ont gouverné ou soutenu les politiques publiques lors de la dernière décennie à la plus grande modestie ainsi qu'à plus de réserve dans leurs critiques et leurs propositions, mais aussi le Gouvernement à respecter une certaine prudence dans l'affirmation de ses certitudes.

Le projet de loi de finances pour 2019 est à la fois un budget de transformation et de transition. En effet, si le déficit budgétaire atteint 98,7 milliards d'euros, il aurait été à périmètre comparable à 76,3 milliards, soit inférieur de 3,7 milliards d'euros au déficit prévu pour 2018. Cet écart de 22,4 milliards d'euros s'explique par le basculement du CICE en diminution de cotisations sociales pour les entreprises, ce qui génère en 2019 une double charge pour le budget de l'État : le CICE de 2018 imputé sur l'impôt sur les sociétés de 2019 et la baisse des cotisations à compter du début du mois de janvier 2019, mais aussi le décalage d'un mois de recettes d'impôt sur le revenu lié à la mise en place du prélèvement à la source, mesure légèrement compensée par l'avènement d'un cinquième acompte d'impôt sur les sociétés pour les entreprises.

Ce projet de loi de finances nous inspire un certain nombre de satisfactions, mais aussi quelques réserves, interrogations et inquiétudes.

Au rang des satisfactions figurent le respect de la trajectoire budgétaire fixée dans la loi de programmation financière pour les années 2018 à 2022, avec un déficit public de 1,9 % du PIB majoré à 2,8 % du fait de dispositions exceptionnelles – je pense au CICE ; la construction budgétaire fondée sur des hypothèses macroéconomiques jugées crédibles par la Cour des comptes, laquelle estime raisonnable le maintien d'un taux de croissance à 1,7 % du PIB ; un maintien pour la deuxième année consécutive des concours financiers aux collectivités territoriales, avec une enveloppe normée stabilisée à 40 milliards d'euros ; une augmentation du pouvoir d'achat estimée par le Gouvernement à 6 milliards d'euros, inflation et fiscalité écologique incluses, mais qu'il faut ramener en progression nette aux environs de 3 milliards d'euros, pour tenir compte du plafonnement de l'évolution des retraites et pensions ; enfin, une légère baisse du niveau des prélèvements obligatoires, qui devrait s'établir à 44,2 % en 2019, au lieu de 45 % en 2018.

Des réserves et interrogations que l'on peut formuler, je ne citerai que deux exemples.

La première réserve concerne la TICPE, dont le produit devrait s'accroître de 3,9 millions d'euros. La plus grande partie de la progression devrait toutefois rester dans le budget général de l'État, le reste étant affecté à la transition énergétique et à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF. Si la hausse et la variation du prix des carburants est bien principalement imputable à l'évolution du prix du pétrole brut, le manque de clarté dans le fléchage du produit de cette taxe a handicapé la pédagogie du Gouvernement et n'est pas étranger à la grogne de nos concitoyens.

La seconde réserve – qui est peut-être plus personnelle – porte sur la désocialisation des heures supplémentaires, qui est bien l'introduction de 600 millions d'euros en 2019 et de 2 milliards d'euros en année pleine de pouvoir d'achat pour les salariés accomplissant des heures supplémentaires. Cette mesure, certes populaire, représente malgré tout un effet d'aubaine, qui a quelques inconvénients et effets pervers, en ne concernant qu'à peine la moitié des salariés du secteur privé, en annulant la création de 12 000 emplois par an et en n'ayant aucun effet de levier sur la croissance et la compétitivité des entreprises.

J'en viens aux inquiétudes et tiens à rappeler la gravité que représente un déficit budgétaire, même ramené à 76 milliards d'euros. Il faudrait en effet, par exemple, doubler les recettes de l'impôt sur le revenu pour retrouver l'équilibre budgétaire.

Par ailleurs, la dette continue de progresser, avec une charge annuelle de 42,5 milliards d'euros.

La dépense publique ne baisse pas et la diminution des emplois dans les services de l'État est assez faible, de l'ordre de 4 000 en 2019, ce qui reporte à la deuxième moitié du quinquennat tout l'effort auquel le Président de la République s'était engagé.

Une autre crainte porte sur les choix qui pourraient être faits par nos compatriotes entre la consommation, l'investissement et l'épargne. Les Français sont déjà parmi les plus gros épargnants du monde, avec 5 100 milliards d'euros de patrimoine financier hors immobilier des ménages. Si les gains de pouvoir d'achat s'orientent vers le renforcement d'une épargne défensive, épargne de précaution peu risquée et peu rémunératrice, cela pénalisera lourdement l'investissement et la consommation des ménages, de même que le renforcement des capitaux propres des entreprises.

Ainsi, la hausse de 0,7 % de pouvoir d'achat du deuxième trimestre de 2018 a pris intégralement le chemin de l'épargne, dont les flux collectés sont passés sur cette période de 16 milliards à 23 milliards d'euros. Messieurs les ministres, les ressorts d'une reprise économique en 2019 sont bien présents sur le plan technique et financier, mais ils risquent d'être neutralisés par une approche psychologique de la situation assez pessimiste de la part de nos compatriotes, largement amplifiée par les évènements et effets médiatiques.

En conclusion, notre appréciation de ce projet de budget est plutôt contrastée, même si elle demeure globalement positive.

Le groupe du RDSE ne remet pas en cause l'orientation générale de la politique du Gouvernement et des importantes réformes structurelles qui sont ou seront engagées. Nos propositions par voie d'amendements concerneront des ajustements mineurs destinés à mieux répondre à certaines situations, sans effets significatifs en termes de masse financière.

Dans la ligne directrice qu'il s'est fixée, l'exécutif doit poursuivre les réformes engagées, accentuer ses efforts pour diminuer la dépense publique et le niveau des prélèvements obligatoires. La majorité du groupe du RDSE ne s'associera pas aux amendements qui pourraient infléchir de manière trop grossière ce projet de budget et soutiendra donc le projet de loi de finances pour 2019. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

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