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Proposition de loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion

Mme le président. La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelle langue parlerions-nous si la monarchie s'était installée à Toulouse ? L'occitan probablement !

Nous connaissons bien les conditions historiques de l'ancrage du français. Les monarques, de Louis XI à François Ier – et la fameuse ordonnance de Villers-Cotterêts –, puis les révolutionnaires de 1789 : tous ont convergé vers un même principe : consolider leur pouvoir par l'usage d'une langue unique. D'un côté, le français servait l'unité du royaume ; de l'autre, l'affirmation de la République.

Au début du XXe siècle, ce n'est pas si vieux, le français n'était pas encore partout la langue usuelle. Voilà cent ans, mon grand-père était instituteur en Aveyron. Il m'a raconté comment il accueillait des élèves qui ne parlaient pas la langue française. À la ferme, on ne parlait pas le français.

Parce que les langues régionales ont aussi constitué le symbole de la résistance au pouvoir central, un sentiment a longtemps perduré, une certaine méfiance à leur encontre.

Aujourd'hui, nous avons heureusement passé ce cap. Il est bien acquis que la République est indivisible : ce principe constitutionnel n'interdit pas pour autant la coexistence du français avec le parler de nos territoires. Les langues régionales ne sont plus considérées comme une menace dans notre pays, qui – disons-le – affronte bien d'autres questions fragilisant sa cohésion.

Plusieurs textes adoptés depuis la fameuse loi Deixonne de 1951 illustrent l'ouverture du législateur sur la promotion des langues régionales. Face au risque de leur extinction, nous pouvons toutefois aller plus loin, comme le propose le texte de notre collègue député Paul Molac.

Est-il utile de rappeler ici, au Sénat, maison des collectivités locales, combien la diversité linguistique est une richesse ?

Je passerai vite sur l'impact positif du bilinguisme sur le développement cognitif des enfants. C'est une affaire de spécialistes ! Seulement par quelques mots, je dirai que les études tendent à démontrer tout le bénéfice de ce que les linguistes appellent « la conscience métalinguistique ». (M. François Bonhomme s'exclame.)

Plus simplement, comme certains orateurs l'ont rappelé, les langues régionales sont avant tout constitutives de notre patrimoine. Elles alimentent la richesse de nos territoires, leur attractivité culturelle. Aussi mon groupe est-il plutôt favorable aux deux premiers articles de ce texte, dont le dispositif renforce la protection patrimoniale des langues régionales.

Si, en 2008, le législateur a intégré les langues régionales à notre Constitution, leur inscription au code du patrimoine marquerait en effet une étape supplémentaire pour leur valorisation et leur conservation.

L'usage d'une langue locale répond aussi à un besoin d'affirmation identitaire, dans un monde très ouvert où la perte des repères et des racines s'accélère. Là aussi, la proposition de loi apporte une réponse : je pense, en particulier, à l'article relatif à la faculté d'utiliser les signes diacritiques dans les actes d'état civil, ainsi qu'à l'article visant à conforter la traduction en langue régionale des inscriptions publiques.

Mais, parce qu'une langue meurt quand elle n'est plus parlée, il faut agir au niveau de la transmission de ces langues régionales, laquelle se fait de moins en moins au sein des familles. Cela pose la question de leur place dans l'enseignement.

À cet égard, la proposition de loi initiale était assez ambitieuse, peut-être un peu trop au regard des leviers déjà existants, et qui ne sont pas suffisamment exploités. Il suffit d'observer ce qui se fait dans certains départements, comme pour le basque, par exemple, dans les Pyrénées-Atlantiques. Le cadre juridique actuel permet déjà de très nombreuses initiatives !

C'est pourquoi mon groupe est favorable à laisser se développer toutes les démarches participatives et actions décentralisées, en particulier avec l'appui des régions.

Mais nous pourrions aller plus loin, s'agissant de la participation financière des communes à la scolarisation, en prenant garde, toutefois, à ne pas fragiliser le tissu des petites écoles en milieu rural.

Enfin, mes chers collègues, le texte ne l'aborde pas, mais il y a d'autres moyens pour valoriser notre patrimoine linguistique. Je pense aux médias. Cette valorisation fait ainsi partie des missions de service public de France Télévisions et Radio France. Plus de 5 000 heures de programmes en langues régionales sont diffusées chaque année, via le réseau France Bleu, mais aussi des radios associatives. J'en profite pour rappeler combien il est important – je suis intervenu sur ce sujet lors de l'examen du projet de loi de finances – de soutenir les radios locales, très fragilisées par la crise sanitaire.

Mes chers collègues, attentif à tout ce qui valorise la diversité des territoires, le groupe du RDSE est favorable à la proposition de loi. Nous espérons qu'elle contribuera à faire vivre toutes nos belles langues locales. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

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