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Proposition de loi relative au délai d'intervention du juge des libertés et de la détention en rétention administrative à Mayotte

M. Guillaume Arnell. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui tend à rétablir à cinq jours le délai de saisine du juge des libertés et de la détention dans le département de Mayotte.

Cette dérogation au droit commun avait effectivement été supprimée par erreur dans la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. Les auteurs de la proposition de loi nous proposent de corriger cette erreur matérielle.

 


Il est utile de préciser l'urgence à adopter ce texte. Sans cela, le délai de droit commun de deux jours s'appliquerait à Mayotte dès le 1er mars prochain. Toutefois, nous ne pouvons adopter cette proposition de loi au seul motif qu'elle vient corriger une erreur sans examiner au préalable la pertinence du dispositif qu'elle entend rétablir.
Pour mémoire, le délai de cinq jours avait été introduit à l'article 31 de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, à la suite de l'adoption de deux amendements identiques des députés de Mayotte MM. Boinali Said et Ibrahim Aboubacar.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Très juste !
M. Guillaume Arnell. Nos deux collègues parlementaires avaient indiqué, dans l'exposé sommaire, que leur amendement avait pour objet de garantir, dans le contexte migratoire particulier qui y prévaut, la mise en œuvre effective à Mayotte des principes des réformes contentieuses de la loi du 7 mars 2016.
Ayant lu avec attention le rapport de notre collègue Thani Mohamed Soilihi, il en ressort effectivement et très nettement que la pression migratoire sur son territoire est extrêmement forte – affolante, même. Ainsi, 48 % de la population de Mayotte est de nationalité étrangère, soit 120 000 personnes pour une population d'environ 256 000 habitants en 2017. Les estimations du nombre d'étrangers en situation irrégulière oscillent entre 60 000 et 75 000 personnes, chiffres très probablement sous-estimés.
Nous pouvons aisément imaginer le grand nombre de dossiers que le territoire doit traiter. Les représentants de la préfecture, lors de leur audition, ont ainsi fait part de leurs craintes quant aux conséquences difficilement surmontables d'une réduction du délai à deux jours. Le délai dérogatoire de cinq jours fait donc largement consensus, tant pour le Gouvernement que pour la majorité des groupes parlementaires. Aussi, le groupe du RDSE votera à l'unanimité en faveur de cette proposition de loi.
Je veux néanmoins rappeler, à toutes fins utiles, que, lors de l'examen de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie par la Haute Assemblée en juin 2018, je regrettais que bien des points n'aient pas été soulevés ou, du moins, approfondis. Ainsi, ce texte ne présentait pas ou peu de solutions sur différents points : la lutte contre la traite d'êtres humains ; la difficile question des mineurs, même accompagnés ; la nécessaire réflexion sur le codéveloppement partout où les États vacillent et où il y a de la détresse économique ; l'impérieuse nécessité, enfin, de confier un rôle plus important aux élus locaux dans la procédure des régularisations administratives.
À titre d'illustration sur ce dernier point, j'avais suggéré la création d'un office des migrations à Saint-Martin, pour mieux coordonner délivrance des titres de séjours et délivrance des titres de travail.
Bien que ces points n'entrent pas dans la discussion sur ce texte, je veux néanmoins inviter le Gouvernement – à travers vous, monsieur le secrétaire d'État – à se saisir ultérieurement de ces sujets importants.
Pour l'heure, au vu des délais contraints, le groupe du RDSE suivra les auteurs de la proposition de loi, afin que celle-ci soit adoptée avant le 1er mars 2019, raison pour laquelle nous n'avons pas non plus proposé d'amendements.
Mayotte, au regard de la pression migratoire exceptionnelle qui s'exerce sur son territoire, mérite que lui soit appliquée une législation différenciée. Mais, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cela ne réglera pas ce problème, beaucoup plus profond et dont il faudra bien, un jour, se saisir. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.)

 

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