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Proposition de loi renforçant le suivi des condamnés terroristes sortant de détention

Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les chiffres avancés suscitent une vive inquiétude : presque 500 personnes seraient détenues en France pour des actes de terrorisme en lien avec la mouvance islamiste, parmi lesquelles un nombre significatif devrait sortir de détention ces prochaines années.

Notre société fait donc face à un double défi : d'une part, celui de la réinsertion d'individus ayant déjà fait acte de leur dangerosité, de leur radicalité et du rejet de notre société ; d'autre part, celui de parvenir à les réinsérer sans renier la philosophie de notre État de droit, laquelle ne doit en aucune manière transiger et céder sur le respect des libertés fondamentales.

Le 27 juillet 2020, le Parlement a donc adopté la loi SILT proposant un dispositif de suivi et de surveillance post-sentencielle pour les individus condamnés pour des faits de terrorisme à leur sortie de détention. Il a été rappelé les motifs pour lesquels le Conseil constitutionnel a été contraint d'en censurer des éléments principaux, considérant qu'en l'état étaient imposées des obligations et interdictions portant une atteinte trop importante à la liberté d'aller et de venir, au droit au respect de la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale.

Toutefois, nous nous réjouissons que le Conseil constitutionnel n'ait pas rejeté le principe de la mise en place de cette mesure. Il nous revient donc de trouver l'équilibre et la justesse qui permettront à ce mécanisme d'être définitivement adopté dans le respect de nos principes essentiels et tout en conservant l'espoir d'une efficacité en vue de la réinsertion des personnes condamnées pour des actes de terrorisme.

Aussi les ajustements proposés par les auteurs de cette proposition de loi paraissent-ils de nature à satisfaire ces diverses exigences. Qu'il s'agisse de la durée de la mesure ou bien de l'encadrement des possibilités de cumul avec les mesures de sursis, ces éléments devraient permettre au dispositif de passer le stade du contrôle de constitutionnalité et, par conséquent, d'entrer en vigueur le plus tôt possible.

De la même façon, je salue les ajustements répondant à la nécessité d'éléments nouveaux et complémentaires pour le renouvellement de la mesure de suivi. La censure constitutionnelle aura ainsi permis d'introduire une nouvelle évaluation établissant la dangerosité sur la base d'éléments actuels et circonstanciés. Il en va de même de la gradation introduite dans le prononcé des obligations susceptibles d'être imposées.

J'ai l'espoir, à l'image de la position de la commission des lois, que la réponse apportée par cette proposition de loi sera de nature à permettre la constitutionnalité du dispositif, lequel prendra mieux en compte la situation, la personnalité ou le niveau de dangerosité de la personne visée par la mesure.

Je souligne enfin un point particulier. Cette proposition de loi intègre le principe suivant lequel la mesure de sûreté ne peut intervenir à l'issue de l'exécution d'une peine d'emprisonnement que si la personne a pu, pendant l'exécution de cette peine, bénéficier de mesures de nature à favoriser sa réinsertion. Cela est évidemment bienvenu et nous permet d'aborder un sujet fondamental, celui du rôle de l'institution carcérale dans notre société. En effet, je crains qu'il ne faille voir ici l'aveu d'une forme d'échec.

Mme Nathalie Goulet. Et comment !

Mme Maryse Carrère. Certes, la prison punit, mais elle ne prépare pas suffisamment à la sortie. Elle joue son rôle de répression, mais ne prépare pas efficacement à la réinsertion, alors même que ce devrait être son rôle principal. De cette manière, nous en sommes réduits à une forme de fuite en avant : après les peines, nous voilà à instituer des mesures post-carcérales avec l'espoir qu'elles seront efficaces, alors même que la prison a failli à sa mission.

Qu'adviendra-t-il si celles-ci se révélaient à leur tour inefficaces ? Faudra-t-il travailler sur un nouveau dispositif qui permettrait un suivi encore plus étendu à l'issue de ces mesures ? Ce n'est évidemment pas la solution, mais cela nous alerte sur une forme de précarité face à laquelle nous devrons nous montrer vigilants dans les années à venir.

Ce dernier point n'empêchera toutefois pas le groupe du RDSE de voter en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

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