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Proposition de loi visant à sécuriser l'exercice des praticiens diplômés hors Union européenne

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

 

 

Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi sur laquelle nous nous penchons aujourd'hui revêt un caractère d'urgence qui en démontre à la fois la nécessité et les limites.

Instauré en 2007 et prorogé à deux reprises, un régime dérogatoire permet aux praticiens à diplôme hors Union européenne d'exercer de manière temporaire, et sous certaines conditions, dans l'attente d'une réussite à l'examen... lui-même dérogatoire.

Si la procédure est plutôt claire pour le dispositif de droit commun qui prévoit un concours portant sur les connaissances et la maîtrise de la langue, nous entrevoyons ici la complexité des deux régimes dérogatoires, mais aussi la difficulté de maintenir un niveau correct d'accès aux soins dans un contexte de désertification médicale.

Identifiée depuis plus de dix ans, cette problématique a poussé le législateur à adopter une solution de court terme pour les établissements de santé ayant du mal à recruter leurs praticiens. Dès 2007, la nécessité de proposer une solution de long terme avait été soulignée. Et nous nous trouvons donc, à la fin de 2018, à devoir examiner dans l'urgence une nouvelle prorogation qui ne règle en rien le problème.

Cette proposition de loi présente tout de même le mérite d'exister. Elle répond d'abord aux fortes inquiétudes des praticiens concernés et des établissements qui les accueillent, à la suite de la censure, par le Conseil constitutionnel, de certaines dispositions du projet de loi Asile et immigration. Il était bien sûr nécessaire de légiférer avant la date butoir du 31 décembre 2018 : nous prendrons donc toute notre responsabilité sur ce point.

Cette proposition de loi répond ensuite aux exigences spécifiques des établissements confrontés à des difficultés de recrutement. Il s'agit non pas de « bricoler », mais de prendre en compte la diversité des situations pour garantir une certaine forme d'égalité et de continuité territoriales. Nous avons bien conscience que cette proposition de loi n'aurait pas lieu d'être si le nombre de postes non pourvus dans les hôpitaux n'était pas aussi important. C'est précisément parce que nous manquons de médecins qu'un régime dérogatoire a été instauré.

Sur cette question de l'accès aux soins, nous pensons pouvoir compter sur l'engagement du Gouvernement, qui a démontré depuis un an et demi sa capacité à imaginer des solutions, que nous avons soutenues pour la plupart et dont nous connaîtrons, je l'espère, les premiers effets d'ici quelque temps.

Dans cette attente, nous avons besoin d'intégrer ces praticiens dans notre système de santé. Nous leur devons la sécurité, si ce n'est la pérennité. Dans certains territoires, dont celui que je connais plus particulièrement, la Meurthe-et-Moselle, ils sont partie intégrante de notre organisation des soins. Nous ne pouvons fragiliser tout un système ; une cessation brutale de leur activité aurait en effet de lourdes conséquences.

Cela ne doit toutefois pas nous faire oublier l'impérieuse nécessité d'engager au plus vite une réflexion concertée. La mise en place d'un dispositif pérenne est la seule garantie d'une intégration durable de ces praticiens, confrontés depuis de trop nombreuses années à la précarité et à des conditions de travail et de rémunération bien moins avantageuses que celles de leurs confrères français. Le ministère semble s'être engagé à faire figurer ce nouveau dispositif dans le futur projet de loi Santé en 2019. Après des années de report, nous en attendons beaucoup.

Le périmètre de cette proposition de loi est limité, car il concerne entre 300 et 350 praticiens, selon les estimations de la DGOS. Si la plupart d'entre eux ont su se rendre indispensables, il faudra néanmoins étudier ce dossier en prenant un peu de hauteur. Trois dispositifs sont aujourd'hui prévus pour permettre la pratique des médecins diplômés hors Union européenne. Ces dispositifs sont une garantie pour la qualité des soins et, surtout, la sécurité des patients.

Notre système de santé est reconnu à travers le monde pour son exigence et son excellence. Il est indispensable de les préserver, y compris dans les territoires sous-dotés, qui n'ont pas à pâtir de l'absence totale d'aménagement du territoire et de vision à long terme que nous subissons depuis des décennies. La désertification médicale n'empêche pas l'ambition ; il est nécessaire de trouver des solutions alternatives, acceptables par le plus grand nombre.

J'en terminerai par un point que j'ai déjà évoqué au cours de mes précédentes prises de parole : l'exercice probatoire réalisé après concours ou examen par les praticiens diplômés hors Union européenne a lieu aujourd'hui en milieu hospitalier. Nous avons déjà eu ce débat au sujet de la réforme des études médicales : nous savons que le lieu de stage détermine en grande partie les choix d'installation des médecins par la suite. Puisque nous manquons cruellement de praticiens en médecine de ville, ne serait-il pas intéressant d'ouvrir l'exercice probatoire à des structures moins hospitalo-centrées ? Pour cela, nous le savons, le rôle de maître de stage doit être rendu plus attractif, car nous manquons aussi cruellement de volontaires.

Pour conclure, vous l'aurez compris, le groupe du RDSE votera en faveur de ce texte, conscient qu'une inaction entraînerait la fragilisation de la situation de nombreux établissements et praticiens. Nous ne manquerons pas, cependant, de regarder avec attention les propositions pérennes qui seront formulées ces prochains mois. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires. – M. Michel Canevet applaudit également.)

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