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Question d'actualité sur les conséquences des décisions du Comité des droits de l'homme de l'ONU

M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

 

Mme Françoise Laborde. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Le comité des droits de l'homme des Nations unies a critiqué, dans un avis du 10 août dernier, la décision de la Cour de cassation donnant raison à la crèche Baby Loup contre une salariée licenciée en 2008 pour non-respect du règlement intérieur.
Le 23 octobre dernier, il a rendu un nouvel avis concernant le bien-fondé de la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public. Ce texte visait à garantir à la fois la dignité de toute personne et le respect de l'ordre public dans sa dimension de sécurité. En 2014, la Cour européenne des droits de l'homme avait jugé que cette loi ne portait atteinte ni à la liberté de conscience ni à la liberté religieuse, et qu'elle n'était en aucun cas discriminatoire.
Contrairement au Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qui est de nature intergouvernementale, ce comité est composé d'experts. Il est chargé de surveiller l'application par ses membres du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont la France est signataire, en produisant des avis informels.
Vous comprendrez notre étonnement aujourd'hui : ce comité demande des comptes à la France, sans pour autant en demander aux pays qui violent des droits humains les plus élémentaires dans le plus grand silence. Ses invectives à répétition sont inquiétantes, laissant croire au monde entier qu'il a un pouvoir juridictionnel. Or seules les juridictions européennes et françaises sont compétentes, et elles se sont déjà prononcées sur notre législation avec l'autorité de la chose jugée.
Le Gouvernement ne doit pas faiblir face à ce qui relève d'un véritable parti pris idéologique. Madame la garde des sceaux, demain 26 octobre se tiendra l'assemblée générale des Nations unies. Le 10 décembre, nous célébrerons le soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen. Nous souhaitons connaître les intentions du Gouvernement, face à des prises de position qui tendent à remettre en cause les fondements de la justice européenne et de notre droit positif. Compte-t-il répondre à cet avis dans le délai de cent quatre-vingts jours fixé par ce comité, et si tel est le cas, que répondra-t-il ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et MM. Pierre-Yves Collombat et Pierre Ouzoulias applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice Laborde, comme vous l'avez rappelé à juste titre, le comité des droits de l'homme des Nations unies est composé d'experts. Il produit des constatations, comme il l'a fait récemment sur la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public.
Dans les deux affaires qui lui étaient soumises, ce comité a estimé que l'interdiction de porter le voile intégral en public constituait une atteinte disproportionnée au droit des deux plaignantes de librement manifester leur religion. Ce comité n'étant pas une juridiction, ses avis ne sont pas des condamnations et n'ont pas d'effet obligatoire.
La loi du 11 octobre 2010 a été jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. S'appuyant sur les articles 4, 5 et 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et sur le Préambule de la Constitution de 1946 en ce qu'il garantit l'égalité entre les femmes et les hommes, le Conseil constitutionnel a estimé que la loi de 2010 apportait une conciliation équilibrée entre liberté religieuse et protection de l'ordre public.
La Cour européenne des droits de l'homme siégeant dans une formation plénière a estimé en 2014 que cette loi était conforme à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où la préservation des conditions du vivre ensemble était un objectif légitime, qui permettait d'interdire le voile intégral.
Certains, je le sais, ont pu s'interroger sur le sens de cette loi ; je veux redire ici que c'est une loi qui protège les femmes, qui protège l'espace public et qui nous aide à faire de la société française une société plus pacifiée et plus respectueuse de chacun. (Mme Catherine Troendlé approuve.)
Bien sûr, toute personne est libre de porter dans l'espace public un vêtement destiné à manifester une conviction religieuse. Toutefois, la loi peut interdire la dissimulation du visage, dans la mesure où cela est jugé incompatible avec les principes de sécurité et de fraternité qui fondent la société démocratique dans laquelle nous vivons. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

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