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Proposition de loi visant à faciliter le désenclavement des territoires

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)


Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, avec cette proposition de loi, le groupe du RDSE réaffirme l'attachement qu'il porte et qu'il a toujours porté à la ruralité et aux territoires fragiles. Ainsi, je tenais à remercier Jacques Mézard de cette belle initiative.
On parle depuis longtemps de « diagonale du vide », de « France périphérique » et de territoires enclavés. Derrière ces expressions, se cache une seule et même réalité : l'éloignement.
L'éloignement de l'emploi, même avec tous les soutiens possibles, comme le tout récent programme du Gouvernement « territoires d'industries », car, sans désenclavement, il n'y a pas d'attractivité économique.
L'éloignement des formations supérieures, qui font que claque année de trop nombreux jeunes quittent nos territoires ruraux pour aller travailler ou étudier dans les métropoles.
L'éloignement des spécialistes de santé, qui nous plonge dans une précarité médicale, avec des fermetures de services toujours plus grandes et des alternatives toujours plus rares.
Parler d'enclavement, enfin, c'est parler de manière plus générale de l'éloignement de l'ensemble de nos services publics, bureaux de poste, trésoreries et écoles. C'est aujourd'hui une réalité insupportable.
Le préalable à cet éloignement est l'accès aux infrastructures routières, ferroviaires et aériennes, comme l'a rappelé mon collègue Jean-Yves Roux.
Cette proposition de loi, nous en sommes bien conscients, ne viendra pas révolutionner les problèmes énoncés, mais elle pose une première pierre et devrait permettre d'amorcer un travail bien plus global qui, nous l'espérons, trouvera aussi des débouchés dans la prochaine loi d'orientation des mobilités.
La première réponse à apporter est l'investissement dans nos infrastructures de transport pour sortir ces territoires de l'isolement. Pour rendre effectif cet objectif en termes d'investissement, il faut l'inscrire dans le marbre. Tel est l'objet de l'article 1er de cette proposition de loi, qui vient intégrer différents critères dans les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.
Si la proposition initiale reprenait les critères de la loi Pasqua de 1995, ceux-ci ont été enrichis et mis à jour par les travaux de la commission, qui ont substitué la notion d'unité urbaine entre 1 500 et 5 000 habitants à celle de centre urbain économique, et qui ont pris en compte également l'éloignement d'une ligne à grande vitesse. Je tiens d'ailleurs à féliciter mon collègue Jean-Pierre Corbisez de la qualité de son rapport.
Cet enrichissement était nécessaire, car le texte initial ne permettait de prendre en compte qu'une petite partie du territoire. À ce titre, nous soutiendrons un amendement visant également à prendre en compte la distance aux préfectures et sous-préfectures, clin d'œil symbolique, mais ô combien d'actualité, à l'idée qui prévalait lors de leur création, celles-ci devant être situées à moins d'une journée de cheval des communes.
Cette insertion des objectifs de désenclavement dans les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires, les SRADDET, ne sera utile que lorsque les infrastructures pourront être adaptées à la réalité des territoires. L'article 2 de la proposition de loi va dans le bon sens, en permettant la réalisation d'infrastructures plus légères et moins coûteuses, dans un contexte budgétaire toujours plus restreint et avec des collectivités qui doivent jongler avec la contractualisation.
Lorsque l'on habite un département qui se situe à huit heures de voiture de Paris et à presque six heures de train, l'aérien est plus qu'une option : il est l'unique solution pour se rendre rapidement dans la capitale. Ainsi, mon territoire, comme de nombreux autres, a investi dans les liaisons internes afin de garder son attractivité, pour les entreprises comme pour les ménages.
Si, actuellement, l'État et la région sont compétents pour organiser les liaisons d'aménagement du territoire, les autres collectivités, à l'image des départements et des EPCI à fiscalité propre, peuvent intervenir dans le financement de ces lignes soumises à une obligation de service public. En fait, elles n'ont pas d'autres choix, si elles souhaitent conserver un accès rapide aux grands centres de décision.
L'objectif de l'article 3 est de réaffirmer cette possibilité, même si les membres de mon groupe auraient souhaité aller plus loin, en laissant l'initiative de l'organisation de ces liaisons d'aménagement aux collectivités du territoire, sans autorisation obligatoire préalable de l'État.
Si ces liaisons sont vitales pour nos territoires et qu'elles sont aussi une vraie réussite, leur gestion laisse parfois les élus financeurs dubitatifs, tant sur le fonctionnement que sur les résultats d'exploitation de ces lignes. N'oublions pas, en effet, le contexte financier pour les collectivités, contraintes par l'État de ne pas augmenter leurs dépenses de plus de 1,2 %, selon les directives actuelles.
Si je prends l'exemple de la ligne Tarbes-Orly, nous sommes sur un taux de remplissage avoisinant les 80 %, avec une croissance du nombre de passagers de plus de 4 % l'année dernière. Malgré cela, on nous explique que cette ligne est déficitaire et que, pour la maintenir, le conseil régional, le conseil départemental et l'agglomération Tarbes-Lourdes-Pyrénées doivent payer.
Je regrette le peu de transparence dans la gestion de ces compagnies, et je ne parlerai pas de la fiabilité de ces lignes, qui accumulent retards fréquents, annulations intempestives et tarifs pouvant aller du simple au quintuple selon le moment de la réservation – ce n'est pas mon collègue sénateur du Cantal qui me contredira à propos de la ligne Aurillac-Paris ! (M. Jacques Mézard sourit.)
Ainsi, je ne puis qu'être favorable aux dispositions prévues à l'article 4 du texte, permettant un plus large contrôle de l'État sur ces lignes soumises à une obligation de service public. L'État doit s'assurer de leur bon fonctionnement et de leur maintien. Pour les collectivités qui les financent en large partie, il est fondamental de savoir où va l'argent investi sur leurs frais de fonctionnement, notamment s'il est bien investi. Nous approuvons donc le compromis trouvé, consistant en la publication, tous les six mois, d'un rapport par les compagnies aériennes.
Ces territoires qui doivent se battre pour garder des liaisons interrégionales sont également ceux, hélas, qui ont été le plus impactés par la limitation de vitesse sur les routes. Ce sont les mêmes dont les habitants, pour avoir accès aux services publics, aux médecins, à une large offre culturelle ou même, simplement, pour se rendre au travail quotidiennement, sont obligés de prendre leur voiture.
Sur ce sujet, la question n'est pas d'être pour ou contre cet abaissement – le débat est d'ailleurs large dans mon groupe. Il s'agit de faire confiance aux élus locaux, qui connaissent leurs territoires.
En conclusion, pour combattre cet éloignement qui organise depuis de trop nombreuses années les inégalités dans nos territoires, il serait nécessaire d'établir une véritable équité territoriale.
Mon groupe, vous l'aurez compris, mes chers collègues, votera cette proposition de loi issue de ses rangs. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et sur les travées du groupe Union Centriste.)

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